"La vie est un pèlerinage, et l’être humain un viator, un pèlerin qui parcourt un chemin jusqu’au but désiré"
Pape François
Nous avons fait cette route d'amitié en compagnie de sainte Jeanne Jugan :
Nous lisons dans l’œuvre du Père Eloi Leclerc "Jeanne Jugan, le Désert et la Rose" ceci :
"Il ne suffit pas de dire « oui » un jour. Ni même un an durant, ni même dix ou vingt. Il faut le dire toute une vie, jusqu’au bout et malgré tout. Jour après jour. Les jours de brouillard comme les jours de soleil, dans la maladie comme en pleine santé.
Beaucoup de saints ou de saintes que nous vénérons sont morts jeunes. Ils n’ont pas connu le grand âge, l’usure du temps, l’épreuve de la vieillesse, avec ses pesanteurs, ses infirmités, ses dépendances. Avec ses longues nuits d’insomnie, de solitude et parfois d’angoisse. (…)
Elle avait quatre-vingt-un ans. Désormais une novice l’accompagnera dans ses promenades. (…) Mais, au fil des jours, ses déplacements deviennent de plus en plus difficiles. Elle demeure bien lucide et bien présente. Presque aveugle, elle ne peut plus ni lire ni coudre. Elle passe son temps priant et méditant, son chapelet à la main.
La sérénité et la joie qui envahissaient de plus en plus le cœur de Jeanne ne laissaient plus de place en elle qu’à la louange. Tout devenait motif de louange. Les menus faits de la journée, comme le souvenir de ce qu’elle avait pu contempler naguère au cours de ses promenades dans le parc et la campagne : les fleurs, la lumière, les champs, les bois… tout chantait en elle la louange de Dieu. »
Ce témoignage bien émouvant à la fois et pleine de consolation, a été donné à la chapelle de Notre-Dame du Verger, au cours de notre marche :
Jeudi 5 janvier 2017, je suis chez mes parents pour effectuer quelques travaux d'entretien et aux environs de 10h30 je reçois un message de Charly, frère de Monique, mon épouse : "Le rappeler le plus vite possible"
Malgré la surprise causée par ce message inhabituel, je termine mon travail et un quart d'heure après, je rappelle mon beau – frère et là, il m'annonce « François, le 2ème fils de Pascal et Béatrice (sœur de Monique) a été assassiné cette nuit à Paris par un avocat » ; il n'a pas plus de détail pour l'instant.
Moment de stupéfaction nourri de beaucoup d'interrogations, pourquoi ? Comment ? Où ? …
Rentré à la maison, les coups de fil s'enchaînent entre les 3 frères et 3 sœurs pour se réconforter et tenter d'obtenir plus de précisions sur ce drame.
Quelques mots sur François. Il est étudiant chercheur. Le soir du drame, il avait finalisé avec sa directrice de thèse les études qu'il avait menées sur une molécule s'inscrivant dans une thérapie contre le cancer. Et il devait le lendemain soutenir cette thèse devant un jury de scientifiques pour obtenir son diplôme de fin d'études. Si François était promis à une belle carrière de chercheur d'après sa directrice, il était d'une grande discrétion mais toujours un sourire aux lèvres qui le rendait très chaleureux et ajoutait à son charme tout en retenue.
Samedi 7 janvier, Monique, Jean Paul (son frère) et Marie Annick (sa sœur) accompagnent Béatrice et Pascal ainsi que les 4 autres enfants qui se rendent à l'Institut Médico-Légal de Paris où se trouve le corps de François.
À leur retour, les premières explications apportées vont nous faire rentrer dans la douleur mais également passer de la stupéfaction à la colère et à un sentiment d'injustice devant ce gâchis de vies brisées. Et plus le souvenir de François habite nos pensées, la douleur et le sentiment d'injustice ressenti devant une telle absurdité alimentent cette colère froide, sourde et inexorablement des pensées de vengeance, de haine commencent à germer dans nos esprits et nos cœurs.
Lundi 9 janvier, mon épouse et moi-même allons à la messe dans la communauté religieuse où nous nous rendons habituellement.
Bien qu'en présence du Seigneur, mes pensées sont très loin d'être apaisées. Puis au moment du Kyrié eleison, surgit cette pensée « prie pour l'âme de l'assassin » et la force qui accompagne cette pensée me la rend comme évidente. Et, immédiatement, je dirai presque à mon insu, sans prononcer aucune parole, mon cœur bascule dans un oui ; aussitôt je sens mon esprit se libérer de cette spirale de pensées négatives. Je prie pour la conversion de l'assassin et offre ma communion pour cela. Depuis cet instant, je vous assure qu'aucune pensée de haine, de vengeance n'est venue troubler ma paix intérieure, même à l'évocation de ce drame. Ma prière s'adresse bien évidemment au repos de l'âme de François et parfois j'y associe la conversion de l'assassin.
Michel J